Une forêt du 3ème type (28 juillet 2007)

Ce matin-là, étais-je encore embué par les songes de la nuit ? Non, je respirais, je marchais, j'allais, je venais, lorsque… ma vue soudain se brouilla. Malaise ? Réplique d'un rêve fantastique ? Je m'arrêtai. Devant moi, au carrefour de la porte de Montrouge et de la rue Friant, avait surgi une forêt. Oui, une forêt dense, impénétrable, angoissante, où l'ombre diffuse disputait à la lumière les rares rayons d'un soleil anémié, prêt à s'éteindre.

Terrifié, atterré, je restais coi. Un instant, un tramway nonchalant et paresseux, effaça l'impression première que m'avait fait cette forêt incongrue et surréaliste.

Reprenant mes esprits, j'examinai la situation avec plus de calme, mon coeur ayant repris son rythme normal, ma respiration se faisant plus lente, plus aérienne.

Mais, me direz-vous, de quoi s'agit-il ? Ne vous êtes-vous pas égaré, cher ami, dans les méandres d'une hallucination soudaine que provoquent les fortes émotions. N'avez-vous pas dépassé le point de non retour, ce point où la folie dépèce de ses griffes velues, la raison paisible et bienveillante ? Votre âme, sans doute fragile, a vacillé devant le spectacle d'une forêt virtuelle, certes disproportionnée vue l'exiguïté des lieux, mais bien naturelle, là dans une ville où la circulation des piétons, des vélos, des motos et de quelques autos, demande de la part de nos édiles, courage et ténacité, pour canaliser les flots toujours plus rugissants et chaotiques de troupeaux indisciplinés qui n'en font qu'à leur tête. Répondez-moi, cher ami, qu'avez-vous vu réellement ?

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Je pensais pouvoir m'en sortir en évoquant une quelconque indisposition qui eût brouillé mes sens. Encore irrité par le spectacle de ces panneaux surgis de nulle part qui m'indiquaient avec force, une zone limitée à 30km à l'heure, un parc à vélos, suivi d'un parc à motos, puis d'un double sens auto/vélo alterné, d'un passage piétons orné d'un ralentisseur pour voiture, le tout surchargé en amont par un panneau m'indiquant la présence aléatoire et sournoise d'un tramway-chenille-tire-bouchon, s'ajoutant à un énorme œil rouge  de cyclope clignotant et menaçant m'enjoignant de stopper net mes velléités de traverser le boulevard lorsque le dit tram se glisse à vos pieds dans un suintement soyeux, je crus  échapper à mon interlocuteur en évoquant une quelconque fatigue qui me faisait "voir" une forêt profonde mystérieuse, à la place de ces indications protectrices portées au sommet de tiges métalliques rouillées, dont la vision de loin eût pu s'apparenter  à  une promenade bucolique dans la forêt de Brocéliande !!

Le mirage était parfait, le fantasme assuré, l'illusion plus réelle que la plus réelle des réalités ! Oui, ce matin-là, j'avais "vu" une forêt, porte de Montrouge, et ce, sur quelques m2 de bitume, tant la densité de la futaie était grande, et je ne parle pas des sous-bois ! Allez vous promener à la lisière de cette forêt, vous ne serez pas déçu…
                                                                                                                                                                   R.R

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