IV - Survol historique de la paroisse Saint-Pierre-de Montrouge (10 septembre 2009)

UNE GRANDE EGLISE POUR UNE GRANDE PAROISSE

Ainsi que nous l'avons vu dans le précédent chapitre, ce ne fut qu'aux tout derniers jours de décembre 1847 que fut inauguré le modeste bâtiment intitulé église Saint-Pierre-de-Montrouge, fruit des efforts persévérants de l'abbé Comte, lequel fut le premier curé de la paroisse. Rappelons que cet édifice se situait exactement entre nos actuelles voies dites rue Thibaud et passage Rimbaut.

L'excellent homme qu'était le curé de la paroisse ainsi créée, ne se doutait guère que la Révolution de 1848 allait éclater quelques semaines plus tard, mais il ne perdait pas son temps, comme on va le voir, au milieu d'une situation politique et sociale qui devait durer jusqu'au rétablissement de l'Empire, à la fin de 1852.

ET NAPOLEON III APPELA HAUSSMANN

Le plébiscite marquant la fin de la IIe République est du 21 novembre 1852, mais, dès le 15 octobre précédent, un notable industriel montrougien,       M. Alexandre Dareau, a été nommé maire de Montrouge, fonction dont il avait été destitué quatre ans plus tôt par la Monarchie de Juillet. Aussitôt il va accélérer les travaux de la nouvelle mairie de Montrouge au Petit-Montrouge. Et, dès le 29 juin 1852, ce sera l'abbé Comte, notre curé de Saint-Pierre-de-Montrouge, qui bénira le terrain de cette mairie, ainsi que la première pierre de l'édifice, qu'allait poser M. Berger, le préfet de la Seine.

L'année suivante, l'Empereur donnait pour successeur à M. Berger celui qui allait être durant dix-sept ans le grand préfet de Paris : Haussmann, lequel se mit immédiatement à la tâche...

UN GRAND ARCHITECTE : VAUDREMER

Notre 14e arrondissement fut pour Haussmann, exécutant les ordres de l'Empereur et surtout réalisant ses plans, le cadre d'une suite de grands travaux comme aucune ville de France n'en avait jamais connue. Haussmann confia à une élite d'architectes et d'ingénieurs reconnus parmi les meilleurs d'Europe : les Belgrand, Couche, Alphand, Quesnel, Vaudremer..., la réalisation du rêve de l'unique souverain urbaniste du XIXe siècle, Napoléon III.

Au Petit-Montrouge, ce fut Emile Vaudremer, architecte de la Ville de Paris (prix de Rome 1854) qui construisit, entre 1860 et 1870, notre église Saint-Pierre-de-Montrouge (tout en bâtissant simultanément, au quartier voisin dit de la Santé, la prison du même nom).

Saint-Pierre-de-Montrouge est certainement une des églises les plus "réussies" de cette époque à Paris, sur un terrain triangulaire dont cet architecte sut tirer le meilleur parti. On a cessé de discuter et même de contester son style (romano-byzantin, paraît-il) et l'on peut dire que cette église, avec son haut clocher carré, s'est parfaitement incorporée à notre paysage urbain, en cette vieille place quasi centrale qui changea tant de fois de nom : Croix-des-Sages, Quatre-Chemins, Puits-Rouge, Saint-Pierre - et, maintenant, de son appellation officielle, "Victor et Hélène Basch",  noms de deux victimes de la dernière guerre (et "place d'Alésia" dans le parler courant).

Et quel "carrefour" extraordinaire sous l'ombre de notre église : la grand-route d'Espagne, continuée au Nord par celles de Germanie et des Flandres (de l'autre côté de la Seine) et recevant comme les affluents d'un grand fleuve la chaussée du duc du Maine, la route de Chevreuse ou de Chartres, la longue rocade des rues de la Convention, de Vouillé, d'Alésia et de Tolbiac... Saint-Pierre est une des églises de Paris les mieux situées...

UNE PAROISSE A GEOMETRIE VARIABLE

Le premier Saint-Pierre, que nous avons évoqué en commençant (c'est-à-dire la modeste église de la rue Thibaud, ouverte fin 1847) était devenu trop exigu, avec le peuplement rapide de la partie de Montrouge dite le Petit-Montrouge, laquelle était bien plus étendue que le quartier créé sous ce nom en 1860. La paroisse de l'époque couvrait la totalité de cette moitié Nord de la commune, à l'intérieur de l'enceinte des Fortifications. Et, en fait, il n'y avait alors d'autre église dans ce secteur que la très modeste chapelle de N.-D. de Plaisance, rue Saint-Médard, actuelle rue du Texel, au nord-ouest du futur Arrondissement. Quand le second Saint-Pierre eut été bâti, il resta l'église de la paroisse du lieu. Ce n'est que beaucoup plus tard, entre la fin du XIXe siècle et les lendemains de la Grande Guerre de 1914-1918, qu'apparurent d'autres églises : N.-D. du Travail en 1901, qui remplaça N.D.  de Plaisance au premier tiers de la rue Vercingétorix . N.-D. du Rosaire en 1911, tout au bout de la rue de Vanves (actuellement rue Raymond-Losserand) ; Saint-Dominique en 1921 (à l'entrée de la rue de la Tombe Issoire) ; d'où autant de paroisses nouvelles, qui réduisirent l'extension territoriale de la paroisse Saint-Pierre-de-Montrouge.

Quelles sont, à l'heure présente, les limites de cette paroisse Saint-Pierre-de-Montrouge ? Les voici, telles qu'elles ont été fixées en 1925 :

- Au nord, c'est la rue Froidevaux, de l'avenue du Maine à la rue Boulard ;

- A l'est, ce sont les rues Boulard et Ernest Cresson, l'avenue du Général Leclerc jusqu'à la rue Sophie Germain ; cette dernière jusqu'à la rue Hallé ; celle-ci jusqu'à la rue Ducouëdic ; celle-ci jusqu'à la rue d'Alembert, laquelle va rejoindre la rue de la Tombe Issoire ; puis cette dernière jusqu'au boulevard Romain Rolland ;

- Au sud, ce même boulevard jusqu'à l'extrémité de l'avenue de la Porte de Châtillon ;

- A l'ouest, l'avenue du Maine jusqu'à la rue Maison-Dieu ; puis les rues Asseline, Didot et d'Alésia ; celle-ci jusqu'à la rue Delbet ; ensuite dans le prolongement de cette dernière, un tracé plus ou moins rectiligne venant couper le boulevard Brune pour emprunter la rue du Général de Maud'huy, puis le début de l'avenue Maurice d'Ocagne et la fin de l'avenue de la Porte de Châtillon jusqu'à rejoindre le boulevard Romain Rolland. On voit donc que l'actuelle paroisse déborde sensiblement à l'Ouest et quelque peu au Nord des limites du Petit-Montrouge, dont elle abandonne, en revanche, l'angle supérieur Nord-Est.

UNE CONSECRATION TARDIVE

La consécration de notre église Saint-Pierre-de-Montrouge n'intervint - pour des raisons qui nous échappent - que plus de cinquante ans après son entrée en service effectif vers la fin du Second Empire : à cette époque il ne manquait plus que la toiture de la plate-forme culminante, qui fut occupée par les Fédérés sous la Commune. Or, nous pouvons lire, en lettres d'or sur une grande plaque de marbre blanc proche de l'entrée de l'église, une belle inscription latine attestant "aux ides de Février MCMXXIII". la consécration du monument. Appelant au secours nos souvenirs scolaires, nous traduirons : le 13 Février 1923. L'architecte Emile Vaudremer a les honneurs de la première citation de l'inscription, ès-qualités de bâtisseur de l'édifice. Puis sont mentionnées les hautes personnalités ecclésiastiques ayant procédé aux rites de la consécration, et notamment le Cardinal Dubois, Archevêque de Paris, et le futur Cardinal Baudrillart.

R.L.C

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