François Gall, le Peintre du Bonheur : derniers jours à la galerie les Montparnos jusqu'au 3 mai ! (28 avril 2024)
« Vous êtes le peintre du bonheur » comme le désignait l’affichiste Raymond Savignac dans l’une de ses lettres, ou encore Paul Ambille président de la Fondation Taylor, dans son hommage au disparu.
C’est cette belle appellation que je choisis en cette nouvelle saison du Printemps des Poètes, pour exposer en quelques dessins, fusains au pastel, huiles sur toile, le parcours de François Gall, peintre, sculpteur, céramiste né en 1912 à Kolozsvár et décédé en 1987 à Paris.
Un parcours sombre jusqu’en 1947
Gáll Ferencz, est né en 1912 à Kolozsvár en Transylvanie hongroise.
Après des études dans sa ville natale, puis Rome, il arrive à Paris en 1936, retournant chaque été auprès de ses parents jusqu’en 1939, mort de son père ce qui l’y immobilise. On le retrouve à l’hôpital américain de Wells en Autriche où il participait aux soins des juifs atteints du typhus. Libéré par les Alliés en 1945, son rêve se réalise : il revient en France, avec pour tout bagage deux mots, piliers fondateurs de sa vie à venir : Paris et la Liberté. Aux Beaux-Arts, il suit les cours de peinture d’André Devambez puis de Charles Guérin. Ses débuts sont marqués par les préoccupations sociales de l’époque : les grévistes, la faim, la rue, les réfugiés, l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale. Sa toile Du pain pour le peuple, immense témoignage de la crise du pain en 1947, lui vaudra la médaille d’Or au Salon des Artistes Français et la Une des journaux.
Peintre de Montmartre et de Montparnasse
Fini tristesse, bonjour Paris !
Naturalisé français en 1949, François Gall faisait partie de ces artistes ayant la double nationalité d’être de Montmartre et de Montparnasse. À Montparnasse, il acquiert la maison - atelier de la Villa Brune du peintre Jules-émile Zingg. Il réconcilie ainsi les deux buttes, revendiquant chacune la naissance de l’art moderne. C’est alors le Paris des grandes amitiés et rencontres décisives, Marquet admiratif de son évolution dans « leur » arrondi du quai de Seine, le secrétaire de Durand Ruel, Dunoyer de Segonzac, Kisling, Edith Piaf ; et le temps de nombreuses poses, il signera les portraits de Marielle Goitschel et France Gall pour le Musée Galliéra - Salon des Peintres Témoins de leur temps. Ce sera Paris, le Quercy d’Eugénie son épouse, la Normandie et la Bretagne où il acquiert à Pont-Aven sa casquette de marin qu’il ne quitte plus.
Les beaux jours
En 1946, il rencontre Eugénie. Ils auront trois enfants : Marie-Lize, Jean-François, Elizabeth-Anne. Un peintre, avec une famille à nourrir dans ce Paris de l’après-guerre, il faut travailler, se renouveler et vendre. Et il vend bien. Il n’est plus le peintre des scènes difficiles. À l’instar de Kees Van Dongen qui passe d’un fauvisme cru à sa période dite «cocktail», François Gall devient le peintre de l’animation parisienne. La galerie Pro Arte en Suisse, l’intègre au groupe des « Maîtres de la réalité poétique ». Il développe alors les thèmes épousant sa vie personnelle, sa famille lui offrant ses modèles les plus naturels, en leurs intérieurs chaleureux. Ce sera aussi les rues de la capitale, ses monuments, la Tour Eiffel, de la Seine des bouquinistes aux scènes de cafés, Longchamp, Auteuil, l’Ile aux cygnes, parcs Monceau, Montsouris, Luxembourg, les champs de coquelicots et noyers, les danseuses, les femmes à la toilette, les nus des Beaux Arts, puis invariablement Eugénie.
Et les grands mâts affichent dans les avenues de Paris, les expositions qui se succèdent : galeries Durand-Ruel, André Weil, Boissière, Bernheim, Wally Findlay.
Nanti de distinctions sociales et artistiques, il est enfin un peintre connu et reconnu dans les musées en France et à l’étranger.
Reconnu aussi pour une vie sociale bien remplie avec la défense du statut des artistes, en de multiples commissions du ministère de la culture, administrateur de sociétés d’entraide, Président du Syndicat National des Peintres, Sculpteurs, Graveurs professionnels…
Un maître mot : Élégance
Sans être mondain, mais toujours élégant avec sa vareuse rouge de Honfleur, Gall croque aussi bien les portraits des collectionneurs que les amis et badauds, mais surtout ceux de ses filles, son fils Jean-François et Eugénie. Dans l’atelier, à la terrasse de La Rotonde à Montparnasse ou lisant dans l’herbe après les parties de pêche ou la récolte dans les champs de noyers en Quercy. Les difficultés financières ne se laissent pas voir. Coûte que coûte, il faut tout donner à la peinture et travailler sans cesse. Le peintre devient un maître reconnu de la couleur, elle est sa marque. Il y a peut-être aussi l’empreinte de sa Hongrie natale. Désormais les rouges et verts se mêlent aux fameux rouges et bleus cités par les critiques d’art. La couleur révèle une sensualité, avec une intensité et une joie que rien ne pourra désormais détruire… Mais l’artiste n’est pas épargné dans sa vie d’homme. En 1980, âgée de 24 ans, Elizabeth-Anne décède dans un accident de voiture. Sur les toiles, et pour toujours, elle est immortalisée dans la lumière. L’œuvre devient le refus du chaos.
Avec Gall c’est le printemps et l’été qui posent
De la palette aux toiles, vibrent les tonalités intenses et chaudes de Gall. Un voile délicieux se pose sur les corps. Un ruban, une draperie, un tissus rayé ou à pois, toujours choisis chez Dreyfus à Montmartre, éclaircissent les noirceurs du monde.
La pose c’est la quiétude du modèle, de face, de profil ou de dos, dans le secret de la toile. C’est l’instant de l’attente, le rêve, la sérénité après l’effort. Quelques notes de piano : est-ce du jazz, une Rhapsodie de Liszt, des phrases de Schuman ou Schubert ? De la partition au miroir, quelques pas de danses, ou ces poèmes de Verlaine, Mallarmé ou d’Eugénie et Marie-Lize ? Textes murmurés dans les verts d’un pré. Les chapeaux disent qu’il fait beau. Les nus racontent des printemps. Avec François Gall, c’est désormais et pour toujours l’été de la peinture, le bonheur sur la toile. Ambille et Savignac avaient raison : « Vous êtes le peintre du bonheur […] et nous l’avions oublié ».
Chez Durand-Ruel, Bernheim, Findlay, et maintenant chez Les Montparnos !
A l’Art Vivant !
Mathyeu Le Bal
Directeur de la Galerie Les Montparnos
François Gall, « le peintre du bonheur »
Galerie les Montparnos 5, rue Stanislas - 75006 Paris
21 mars au 3 mai 2024 - Tlj. 10h-19h Sauf le dimanche
Un tres beau catalogue de l'exposition a été édité :
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