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08 mai 2022

"A la gloire des démolisseurs" sculpture d’Anna Waisman (1928-1995 )

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Anna Waisman, artiste du 14e arrondissement,

honorée lors du 100e anniversaire des Joyeux Lurons de la Commune Libre de Montmartre.

De tous temps, pierres et pavés ont jonché l’actualité, notamment à Paris. Les pierres des uns servant aux constructions des autres.

Plus près de nous, mai 68, « sous les pavés, la plage » disait - on, et ça castagnait ! 1958, sous un amas de pierrailles, une page d’histoire et un talent… Armée de tenailles et d’un tournevis, la danseuse étoile Anna Waisman attaque les pierres du Viaduc d’Auteuil en démolition, et taille deux bustes imbriqués, l’un tenant un marteau.

L’association des Joyeux Lurons de la Commune Libre de Montmartre, organisatrice du mariage de Thierry le Luron et Coluche, a aussitôt acheté cette œuvre, dite  A la gloire des démolisseurs. 

Autodidacte de talent, encouragée par le sculpteur Zadkine

Accidentée, cette danseuse étoile de l’Opéra de Strasbourg où elle naît en 1928, puis des ballets d’Amérique Latine, doit arrêter la danse. Autodidacte, elle est animée d’un étonnant feu créatif, et elle prolonge alors la sculpture musicale de son corps, par celle de la pierre. Le sculpteur Zadkine la découvre par tous les temps près de son atelier rue d’Assas, travaillant comme un homme sa première œuvre sur un chantier. Il est admiratif et l’encourage, à l’instar de leur voisine, La Compagnie du Gaz qui lui offre son premier burin.

Anna fait bientôt la « Une » de nombreux quotidiens, dont l’Aurore, Le Figaro, France Soir présentant des sculptures inspirées de son vécu de danseuse, et celles qui « développent une esthétique néo-figurative où l’on reconnaît plusieurs figures de la Bible et de la littérature ». Ainsi, le prophète Jérémie, auquel André Neher, rabbin et philosophe a consacré une monographie. Une longue correspondance s’ensuivra entre lui et l’artiste, sur l’art et le judaïsme.

Travail sur la lettre hébraïque en 3 dimensions

A la naissance de son fils Samuel en 1963, elle se lance dans un premier dessin à l’encre de Chine et se consacre à un travail de recherche mnémonique sur le point et le trait, sur papier, toile, polystyrène. Des milliers de points et traits plus tard, elle comprend la formation d’un corps dans l’espace. Les points deviennent sphères et les traits parallélépipèdes rectangles, et respectivement Youd et Vav, soit les pierres basiques permettant de former l’alphabet hébraïque. En taille directe, elle le réalise en trois dimensions, puis par emboîtement des lettres les unes dans les autres, ou travaillées dans le vide, ou encore autour du plein et du vide, puis du fil. Avec ses lacérations et déchirures de papier, elle arrache une lettre hébraïque, et ce vide en fait apparaître une autre.


Dès 1983 Anna Waisman va plus loin encore dans la recherche et la création, abordant le collage de composants électroniques, puces, fils, éléments d’ordinateurs, microprocesseurs, expliquant « qu’ils sont un véhicule de la pensée contemporaine, témoins, comme l’artiste, de leur temps […] symbolique de la mémoire et de la communication ».

Ces trois façons de s’exprimer sont liées par un fil conducteur, fil rouge, couleur de l’énergie. Depuis longtemps, l’artiste est totalement dans la modernité, dépassant ce qui pouvait être imaginé alors, comme l’écrit A. Neher : « A voir ces couleurs et ces rythmes d’un univers tout en esprit et en symboles, on risque d’oublier la lutte souterraine menée par la créatrice à l’affût acharné de moyens plastiques jusqu’ici inconnus. »

Elle pourrait le confirmer avec les vers de son poème J’aime :

"J’aime la vérité, car elle est conscience, que pour la trouver, il faut être seul.

J’aime le moment qui va venir car le présent est déjà passé et j’oublie"

Le parcours atypique d’Anna

Ce parcours honoré de distinctions, est reconnu par des galeries, salons, collectionneurs, médias, ventes publiques et l’Etat, en France et à l’international. Il lui permet en 1981 de réaliser le Mémorial des martyrs juifs de la barbarie nazie, installé à Sarcelles. Nul doute que cette trajectoire puisse s’ajouter à celle de ses consœurs, femmes artistes reconnues qui font désormais l’objet de diverses émissions et expositions.

Sa quête de la perfection, elle l’a réalisée peu à peu, chez elle, dans le 14e arrondissement, quittant les berges de la Seine pour les rues Raymond Losserand, du Texel, et enfin du Château. Loin des mondanités elle s’est concentrée dans la méditation et le calme, tout en appréciant le pittoresque du Sud de Montparnasse, là où ses illustres prédécesseurs s’étaient installés.

« L’art est mon bouclier, et les lettres hébraïques ma couronne », écrivait-elle.

Autour de cette couronne, la famille d’Anna Waisman, son fils et ayant droit Samuel Blumenfeld, et son épouse Sibylle, en charge du Patrimoine et de la valorisation de l’œuvre, pourront nous en dévoiler la symbolique ce 15 mai prochain. Date à laquelle l’association des Joyeux Lurons va à nouveau inaugurer leur sculpture - mascotte et honorer sa créatrice, Anna Waisman.

 

"A la gloire des démolisseurs"

Ré-inauguration de la sculpture d’Anna Waisman

Commémoration des 100 ans des Joyeux Lurons de la Commune Libre de Montmartre

dimanche 15 mai 2022 à 11h

7 rue du Mont Cenis -  75018

 

 Marie-Lize Gall

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