14 novembre 2008
Jacques et son Maître de Milan Kundera d'après l'oeuvre de Diderot au Théâtre 14
Milan Kundera nous dit en préambule qu’il « a voulu rendre hommage à Diderot », sous la forme d’une « variation ». Qui dit variation, dit « thème », comme peut le concevoir un compositeur de musique. Aussi, cette"reconstruction" au sein de l’action théâtrale prend ici la figure d’un édifice à plusieurs étages.
Tout d’abord, trois histoires d’amour dont deux possèdent une enchevêtrement qui est loin d’être linéaire. La troisième, indépendante des deux précédentes, démontre un état de la société à l’époque de Diderot, où la naissance, la situation sociale dominante confèrent à celui qui la possède, un pouvoir exorbitant sur les gens du peuple, et surtout sur le monde féminin.
Mais le noyau central de la pièce de Kundera, c’est évidemment une méditation profonde sur ce qui caractérise l’importance de la destinée humaine, sur ce qui est « inscrit » dans chaque vie, et ce qui ne l’est pas . « La destinée est dictée d’en haut », ce qui amène à nous demander si nous sommes responsables de tous les actes de notre vie. C’est par la seule liberté, qu’il nous est donné de choisir. Les « ordres viennent d’en haut », dit le Maître, mais « le serviteur peut et doit choisir l’ordre qui lui convient le mieux ». On assiste ici à un face à face où les tenants du pouvoir sont confrontés à un contre-pouvoir. Critiquer l’ordre établi est déjà une étape pré-révolutionnaire pour la conquête de l’égalité.
Cette mise en accusation est très présente dans la pièce de Kundera , où Jacques et son Maître sont en constante opposition, même si l’apparence d’une amitié superficielle et de circonstance soude à de rares moments, les relations entre les deux personnages en une fraternité surfaite.
A tout ceci, il faut ajouter qu’un climat de jouissance amoureuse délibérée, liée à un libertinage propre à l’époque, donne à cette pièce une atmosphère festive, éloignée de l’hypocrisie des dévots et autres pisse-froid ! Les mots s’ajoutent aux images pour leur conférer la crudité qu’il convient…
Résumons . Voici une pièce foisonnante, pleine de vie, d’émotions, d’amours contrariées et trahies, dans le plus pur style du marivaudage, mais où cependant les questions existentielles sont exposées en filigrane, où la joie organique, la jouissance, la recherche du bonheur survolent nos destinées pour mieux masquer, mais non effacer, la question ultime qui se pose à l’humanité depuis ses origines : où va-t-on ?
Rendons hommage à la qualité de la troupe où Yves Pignot et Nicolas Briançon traduisent avec bonheur et profondeur, à la fois la truculence, l’aventure, les aléas de l’amitié et de l'amour, mais aussi le désarroi, l’angoisse, la solitude de leurs personnages, les vicissitudes de leurs destinées, c’est-à-dire en fin de compte la nôtre.
R.Rillot
- Théâtre 14 J.M. Serreau – 20, avenue Marc Sangnier – 75 014 – du 11 novembre 2008 au 3 janvier 2009 - Locations : 01 45 45 49 77 -métro Porte de Vanves. Bus 58 et 95. Tramway Didot jusqu’à 1h du matin.
06:00 Publié dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : diderot, milan kundera, jacques et son maitre, paris 14, theatre 14, jm serreau | Facebook | | Imprimer |
17 octobre 2008
Avis de mauvais temps sur les théâtres municipaux: le Théâtre 14 menacé ?
L’inquiétude fait suite à une déclaration de Christophe Girard, adjoint chargé de la culture, au sujet des six théâtres municipaux, Silvia Monfort, Paris Villette, Mouffetard, Théâtre 13, Théâtre 14 et Vingtième Théâtre. La mairie affecte cette année 3,6 millions d’euros à ces théâtres, mais annonce une importante réforme et remet en cause le système de subventions. «Ces subventions sont déterminées en fonction de la programmation mais aussi de leur fréquentation." Par exemple, le théâtre Sylvia Monfort « reçoit aujourd’hui une subvention de 900.000 € alors que son taux de remplissage annuel n’est que de 45 % ».
Mais Christophe Girard veut aussi reconsidérer la fonction de ces salles, et semble penser qu’il y a trop de théâtres, à moins que ce soit leur programmation qui n’est pas conforme à ses vues: « Dans certains quartiers, il n’est pas vital qu’il y ait autant de théâtres. On manque de salles de répétitions à Paris : certaines pourraient se consacrer à cet usage. ». Et cette réforme concernera « deux ou trois lieux ». Il n’a pas précisé quels seront les heureux élus, parmi les six.
Pierre Castagnou craint pour le Théâtre 14 et s’en est ému : « ce changement porterait un grave préjudice au quartier de la Porte de Vanves où ce théâtre est situé et au 14ème arrondissement dont il est l'un des piliers de l'action culturelle »
Mais que vaut le vœu d’un maire d’arrondissement face à un adjoint de Bertrand Delanoê ?
A.C.
07:00 Publié dans 3- Vie des quartiers, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : theatre 14, paris 14, cristophe girard, pierre castagnou, bertrand delanoe | Facebook | | Imprimer |
29 août 2008
La journée des dupes au Théâtre 14
« Depuis l’entrée de Richelieu chez Marie de Médicis, tel Ruy Blas et son célèbre –Bon appétit Messieurs !- jusqu’au coup de théâtre que constitue le soudain ralliement de Louis XIII à ce prélat qu’il déteste, tout est là pour tenir le spectateur en haleine. Ajoutons à l’intrigue fort pittoresque : Richelieu, glacial et implacable, mais aussi angoissé, vulnérable, et finalement très humain ; Marie de Médicis, passionnée, forte en gueule, parfois risible quand elle jure en italien, Anne d’Autriche, épouse de Louis XIII, si seule, si révoltée, rêvant d’un grand amour auprès de Gaston d’Orléans, frère du roi, ce bellâtre qui conspire dans l’ombre ; Louis XIII, si seul lui aussi, timide, malade, mais plus intelligent, plus courageux qu’il ne lelaisse paraître ».
Théâtre 14 – 20 avenue Marc Sangnier – 75014 Paris – métro : Porte de Vanves. Bus 58, 95 et tramway.
- Représentations du 9 septembre au 25 octobre.
- Réservations : 01 45 45 49 77, du lundi au samedi de 14 heures à 18 heures - 27€ ou 19€ adhérents
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La journée des dupes au Théâtre 14
« Depuis l’entrée de Richelieu chez Marie de Médicis, tel Ruy Blas et son célèbre –Bon appétit Messieurs !- jusqu’au coup de théâtre que constitue le soudain ralliement de Louis XIII à ce prélat qu’il déteste, tout est là pour tenir le spectateur en haleine. Ajoutons à l’intrigue fort pittoresque : Richelieu, glacial et implacable, mais aussi angoissé, vulnérable, et finalement très humain ; Marie de Médicis, passionnée, forte en gueule, parfois risible quand elle jure en italien, Anne d’Autriche, épouse de Louis XIII, si seule, si révoltée, rêvant d’un grand amour auprès de Gaston d’Orléans, frère du roi, ce bellâtre qui conspire dans l’ombre ; Louis XIII, si seul lui aussi, timide, malade, mais plus intelligent, plus courageux qu’il ne lelaisse paraître ».
Théâtre 14 – 20 avenue Marc Sangnier – 75014 Paris – métro : Porte de Vanves. Bus 58, 95 et tramway.
- Représentations du 9 septembre au 25 octobre.
- Réservations : 01 45 45 49 77, du lundi au samedi de 14 heures à 18 heures - 27€ ou 19€ adhérents
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10 juin 2008
Jules César au Théâtre du 14ème
Les derniers instants de la République sont soumis aux passions dévorantes des ambitions…
César, maître absolu de Rome, saura-t-il échapper, en dépit de l’avertissement prémonitoire des songes, au complot ourdi par les « libérateurs » de la Ville éternelle et de son peuple ?
Tout pouvoir génère, lorsqu’il agit en dehors de tout contrôle démocratique, une tyrannie qui accélère sa future faillite. Il attise le sentiment de jalousie et d’envie au sein de ceux qui prétendent se mettre au service du peuple. Mais dans la Rome antique, accéder au pouvoir, c’est rivaliser avec les dieux, c’est s’assurer de leur protection, mais c’est aussi prendre leur place. C’est justifier a posteriori la naissance d’autres impostures, d’autres tyrannies, d’autres mensonges, d’autres meurtres !
Ainsi Brutus, Cassius et quelques autres, auront la peau de César, mais in fine, ils s’entre-déchireront autour de sa dépouille, pour régner à leur tour. Les ambitions individuelles annihilent toute fraternité si celle-ci n’est que façade. Le glaive aura raison des unions de circonstance, des amitiés passagères et fragiles. Le complot portera en lui le germe de son inéluctable éclatement.
Ici, Shakespeare a écrit beaucoup plus qu’une tragédie politique. Il étudie et nous livre la catharsis de toutes les passions humaines. Et c’est dans une langue survoltée, déchaînée, presque « surhumaine » qu’il enflamme et notre esprit et notre cœur.
A travers l’expression échevelée, quasi écartelée du langage, il nous fait toucher par la puissance irrépressible du verbe, l’abîme des passions, celles-ci étant portées au plus haut degré de leur déchaînement incontrôlé.
Par une mise en scène au relief saisissant, à la fois sobre et vivante, le spectateur sera conquis par la prestation de tous les éléments de la troupe, qui donne son énergie sans réserve à cette tragédie « sauvage » et pleine de fureur. La raison s’efface devant la folie. Alors, l’ambition du pouvoir portée à son incandescence sombrera dans le cratère de la mort !
R. R
Théâtre 14 Jean-Marie Serreau – avenue Marc Sangnier 75014 - Représentations jusqu’au 12 juillet – Location au théâtre : 01 45 45 49 77 – courriel : theatre14@wanadoo.fr
06:00 Publié dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Shakespeare, théâtre 14, Jules cesar | Facebook | | Imprimer |
27 mai 2008
Théâtre 14 : Jules César
09:10 Publié dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théâtre, Shakespeare, théâtre 14 | Facebook | | Imprimer |
03 mai 2008
Printemps de la jeune création théâtrale.
Nombreuses représentations gratuites du 3 au 17 mai au Théâtre 14, 20 avenue Marc Sangnier.
Samedi 3 mai, 20h30« Resist-tente »,pièce écrite et mise en scène par la Compagnie Les S.D. OUF.
Issus des Enfants de Don Quichotte, Marc, Kamel, et Myriam ont connu la rue. Ils racontent des anecdotes vécues au Canal Saint Martin.
Lundi 5 mai, 20h30« L’Inconnu »de Anthony Diaz mise en scène par la Troupe de théâtre du Conservatoire du 14e.
Rire pour résister. Une famille face à la désillusion du quotidien, la violence… le rire peut-il les sauver ? Sélection du concours « Rire de résistance » du Théâtre du Rond Point.
Mardi 6 mai, 20h30« La Semeuse »de Fabrice Melquiot mise en scène par la Compagnie La Contemporaine.
Une femme éparpille aux quatre coins de l’Europe les poèmes de son amant envolé.
Mercredi 7 mai, 20h30« Qui a ramené Doruntine ? » d’Ismaïl Kadaré mise en scène par la Compagnie Argjiro.
Une enquête policière dans une Albanie plongée dans une obscurité totale. Ismail Kadaré dépeint un peuple qui souffre de l’isolement et Constantin comme celui qui sort de l’obscurité.
Jeudi 8 et vendredi 9 mai, 20h30 « Entre chiens et loups »Mise en scène par Marie-Do Fréval.
Fable urbaine et policière écrite et jouée par les jeunes de la Troupe Enfant Phare. Des chiens prennent la parole pour nous raconter leur vie et leurs déboires.
Mardi 13 mai, 20h30 « Les muses orphelines »de Michel Marc Bouchard mise en scène par la Compagnie Ni poil ni plume.
Frères et soeurs se retrouvent pour tisser et casser les entrelacs de leur intrigue familiale. Le retour improbable de leur mère : un drame cinglé par l’humour.
Mercredi 14 mai, 20h30 « Elles, à trois sous un pommier »de Lothar Trolle dans la traduction de Maurice Taszman mise en scène par la Compagnie Pérédelkino.
Elles, une comédienne écartelée entre l’exercice de sa profession et les travaux du verger de sa mère.
Jeudi 15 et vendredi 16 mai, 20h30« Khadija au bord d’un lac »de Miguel Angel Sevilla mise en scène par la Compagnie Nathalie Sévilla.
Après Khadija vient à Paris et Khadija passe à la télévision, Khadija au bord d’un lac est le troisième volet consacré à ce personnage attachant : une jeune fille venue d’Adbijan à Paris.
Samedi 17 mai, à 14h, 15h30 et 17h Les jeunes comédiens des ateliers théâtre de la Comète montent sur scène.
Samedi 17 mai, 20h30 « Princesses »de Fatima Gallaire.
Chronique de l’Algérie moderne
Entrée gratuite .Théâtre 14, 20 avenue Marc Sangnier. Métro : Porte de Vanves. Tramway : porte Didot Bus 58.
15:30 Publié dans La Voix ci, La Voix là | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paris 14, theatre, theatre 14, 75014 | Facebook | | Imprimer |
02 février 2007
Georges Dandin - Un anti-héros
Entre la comédie satyrique, le drame d'amour et la farce populaire, la pièce de Molière, replacée dans un cadre contemporain des années 30, offre à la réflexion deux thèmes principaux qui s'appliquent à notre époque, avec une étrange acuité.
Tout d'abord, la notion "d'ascenseur social" – tarte à la crème de nos contemporains - où chacun espère s'attribuer les avantages supposés des gens qui ont "réussi", en singeant leurs attitudes, leurs mœurs, leur soif de pouvoir, et leur besoin de paraître. Georges Dandin est de ceux-là. Il est devenu "noble" par défaut où mieux par son argent qui lui a permis d'accéder au mariage avec une jeune fille d'une famille noble mais ruinée… Mésalliance évidente qui lui fera regretter ce mariage, très vite. Il n'est pas un seul instant où les beaux-parents ne lui feront remarquer avec mépris et condescendance sa situation inférieure de parvenu qui n'a pas sa place dans la "noblesse" des gens d'en haut… Ce thème est toujours à l'ordre du jour.
Second thème important : la soumission à l'époque, des filles à leurs parents et des femmes à leur mari. En filigrane, l'oppression s'exerce à travers une société où les tabous éducatifs ont force de loi. Angélique, femme de Dandin clame et revendique à qui veut l'entendre, sa "liberté de connaître le monde", son besoin de s'émanciper du poids de la tradition qui veut qu'un mari ait tout pouvoir sur sa femme. Pouvoir pérennisant sous une autre forme la toute puissance éducative et morale des parents sur leur enfant, et ceci par le biais d'une chaîne de soumissions qui se renouvelle à chaque génération… Angélique par sa révolte encore hésitante et balbutiante, chante un hymne à la liberté d'exister, à la revendication d'être un "sujet" et non plus un "objet". Nous sommes là aux frontières d'une revendication qui n'apparaîtra au grand jour que dans les années 1970, soit trois siècles plus tard !
Ainsi, Molière, par sa comédie-farce, où le grotesque est omniprésente parmi les personnage, nous est très contemporain. Cette pièce aurait pu être écrite aujourd'hui, parce qu'elle pose le problème des relations entre les différentes classes de la société, et celui concernant la liberté des femmes, sujet de leur émancipation progressive et semble-t-il irréversible.
Molière révolutionnaire ? Peut-être. En tout cas, très proche des préoccupations de nos contemporains. Félicitons Marcel Maréchal qui a su dans une mise en scène résolument moderne et originale – l'action se passe en 1930 au bord de la mer – mettre en avant le désespoir de G. Dandin. Molière amène celui-ci vers la "sortie", en l'invitant à "se jeter dans l'eau, la tête la première". Ce qu'il fait ! Un clin d'œil vers ceux qui ne verraient la solution que dans une fuite en avant désespérée.
Spectacle jubilatoire, à déguster sans réserve, d'autant que la troupe des Tréteaux de France est parfaite, chacun donnant à son rôle la juste mesure de son talent.
Raymond Rillot
Théâtre 14 : 20, avenue Marc Sangnier – 75 014 – jusqu'au 3 mars 2007. Loc. 01 45 45 49 77
09:00 Publié dans Théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théatre, theatre 14, paris 14, geoges Dandin, Molière | Facebook | | Imprimer |